Les chats des neiges ne sont plus blancs en hiver

En avril, les éditions de L’Homme Sans Nom devaient publier le premier roman de Noémie Wiorek, Les chats des neiges ne sont plus blancs en hiver. Dans le contexte actuel, la parution papier a été repoussée mais vous pouvez vous procurer la version numérique via Emaginaire. J’avais eu la chance de me le procurer en avant-première lors de la Foire du livre de Bruxelles et voici ce que j’en ai pensé…

« Dans ce royaume où la férocité est reine, les ours foulent la neige sans crainte, monarque des terres mortes. Leurs gueules dégoulinent du sang des proies fraîchement éventrées, et ils promènent, goguenards, leurs yeux le long d’une ligne d’horizon qu’un soleil pâle parvient à peine à faire rougeoyer. L’astre n’arrache aucune larme à la neige éternelle.»

Jouer avec les stéréotypes du genre

En lisant ce roman, il est vite évident que l’autrice use volontairement des clichés de la fantasy jusqu’à l’extrême, présentant un méchant, nommé sobrement Noir, en lutte contre un royaume vénérant la Lumière. Heureusement, l’autrice m’avait m’avait prévenu que ce choix était voulu et assumé pour mieux pointer du doigt les travers de ces stéréotypes et les bousculer un peu. Il n’empêche que ça m’a toutefois un peu dérangé à la lecture. En conséquence, les personnages manquent en effet de nuances et leurs objectifs nous paraissent extrêmement flous. J’apprécie pourtant la volonté de railler ces clichés mais je ne suis pas certaine que je l’aurai perçu ainsi si on ne m’avait pas averti… C’est donc un choix plutôt risqué de la part de l’autrice pour un premier roman! Il n’empêche que les retournements de situation n’en sont que plus savoureux car plutôt inattendus malgré l’impression générale de déjà-lu liée aux stéréotypes de genre. L’histoire est finalement très loin d’être manichéenne et plutôt originale dans son développement. En tout cas, c’est certain, l’autrice a réussi à me perturber avec son ton légèrement sarcastique.

« Brayar songea à quoi ils en étaient réduits: à brûler des pouilleuses qu’on accusait d’être des sorcières pour empêcher les ténèbres de les atteindre de l’intérieur.»

Une plume prometteuse mais quelques failles

Dès le prologue, j’ai été conquise par l’écriture de Noémie Wiorek qui parvient à offrir des moments de grande poésie et une ambiance très immersive. Bien que l’univers soit plutôt sombre, on retient surtout la beauté des descriptions. Malheureusement, en comparaison, les scènes d’action m’ont paru parfois un peu confuses. Je ne sais pas si c’est la période qui met à mal ma concentration ou si c’est lié à l’écriture mais certains passages m’ont demandé une relecture pour comprendre comment on en était arrivé à tel stade. Ceci, couplé à quelques longueurs dans l’ensemble du roman, a créé un certain sentiment de lassitude que j’ai eu du mal à combattre dans cette période de panne de lecture. Je pense que je n’ai pas lu ce roman au bon moment et je lui redonnerai certainement une chance quand mon rythme de lecture sera à nouveau revenu à la normale. J’ai malgré tout accroché jusqu’au bout, en grande partie grâce à personnage d’Agnieszka que j’avais vraiment envie de suivre jusqu’au bout. Par contre, à ce propos, bien qu’elle soit très jolie, je regrette que la couverture de François-Xavier Pavion ne reprenne pas la chevelure blanche si caractéristique d’Ania… 

En bref, Les chats des neiges ne sont plus blancs en hiver est un roman de fantasy qui prend des risques en usant volontairement, et à l’extrême, des clichés du genre. L’écriture de Noémie Wiorek est en tout cas très prometteuse et même si ce premier roman reste imparfait, il reste une belle lecture que je n’ai surement pas découvert au bon moment malheureusement.

« Morz est la terre la plus au Nord du monde. Des siècles plus tôt, la neige a cessé de tomber et la glace a fondu, devenue une boue informe et immonde. Il y a une ombre dans l'Est de Morz ; celle de Noir, un esprit maléfique prêt à tout pour provo-quer la ruine du royaume. Sur ses talons court le Second, un guerrier prodigieux, plus cruel et féroce que tous les séides gravitant autour d'eux. Il y a un enfant sur le trône de Morz : on attend de lui la ferveur de ses ancêtres pour maintenir le royaume dans la Lumière. Mais le prince Jaroslav doute de sa place, de son pouvoir et ne souhaite qu'une seule chose : vivre en paix. Et dans le Nord, près des montagnes, ourdissent les sorcières, vengeresses, dévorées par le rêve incertain de refaire un jour tomber la neige sur leur monde déchu.»

(Illustration de couverture: © François-Xavier Pavion)

[Lecture n°24/60 (pour l'échelon 4) pour le Challenge de Littérature de l'Imaginaire édition 8 de Ma lecturothèque]

- Lecture pour le Challenge #HMSFFF - Avril 2020: Anti-héros -