Chère brigande : lettre à Marion du Faouët

Tout petit livre fraichement publié aux éditions Sabine Wespieser, Chère brigande est une lettre rédigée par Michèle Lesbre à Marion du Faouët, Robin des bois féminine et bretonne du siècle des Lumières. Voici (une fois n’est pas coutume) un bref avis de ce que j’ai pensé de ce bref essai littéraire.

"Chaque époque a ses tortionnaires, ses pouvoirs usurpés, ses sacrifiés, ses espoirs évanouis et, heureusement, ses rebelles."

Une trop courte pépite

Chère brigande est un texte magnifiquement écrit, d’une simplicité dans le geste et d’une telle richesse dans le style et dans le ton. Michèle Lesbre, qui, par hasard rencontre une rousse SDF au caractère singulier, commence à penser à une autre rousse de l’histoire bretonne et lui écrit une lettre.  Celle-ci s’adresse donc à Marion du Faouët, jeune femme rebelle, mais s’adresse aussi à l’auteur elle-même, qui plonge elle aussi dans son passé, et à la société toute entière, que la personnalité et l’histoire de Marion interroge. Cette lettre nous permet donc de rencontrer cette fameuse Robin des bois, bien que le texte s’adresse à elle et n’est pas sur elle exclusivement, nous poussant à la curiosité pour mieux la découvrir ensuite. Mais l’auteur évoque également d’autres personnalités fortes, qu’elles soient féministes, ou tout simplement représentantes de la notion de Liberté. Tout ce foisonnement nous amène, de fait, à la rencontre de Michèle Lesbre elle-même, dont la vision du monde m’a conquise et avec laquelle je partage beaucoup d’opinions. C’est un texte qui n’est finalement pas tant sur Marion du Faouët, ni même sur la jeune rousse de la rue, mais sur l’humain, sur la liberté, sur la rébellion face aux injustices de notre monde, et au fonctionnement néfaste d’une société en péril. C’est une lettre d’engagement, de colère un peu parfois.

La plume est légère, envolée, lyrique, comme si Michèle Lesbre avait écrit tous ces passages en une seule fois, suivant son propre ressenti et le fil de sa pensée. Alors oui, parfois c’est un peu confus, parfois notre cheminement à nous n’aurait pas suivi le sien, mais c’est aussi ça qui permet la découverte. Je regrette cependant son format, très court (77 pages, bien aérées), qui le rend d’une part trop onéreux à l’achat (12€ pour 30 minutes de plaisir) mais aussi assez frustrant car n’allant pas au bout des choses. Alors que nous ressentons que les sujets pourraient être plus longuement traités, on se retrouve dans un format court trop restreignant. J’aurai aimé une lettre du genre de celles publiées dans la collection « Les Affranchis » chez Nil (comme celle, bouleversante d’Annie Ernaux, L’autre fille), quitte à risquer quelques longueurs, mais pour ne pas rester sur ma faim.

"La vraie violence n'était-elle pas celle des soldats qui, quelques années auparavant, avaient ravagé la campagne, violé les femmes, pillé les paysans qui se révoltaient? Mais celle du pouvoir n'est presque jamais reconnue, c'est encore vrai aujourd'hui."

En bref, Michèle Lesbre nous propose ici un texte de belle facture littéraire mais malheureusement beaucoup trop court.

« La silhouette libre et rebelle de Marion du Faouët, « Robin des bois » bretonne qui, dans les premières années du XVIIIe siècle, prenait aux riches pour redistribuer aux pauvres, a toujours fasciné Michèle Lesbre.

Parce qu’une femme aux cheveux roux prénommée Marion, qui avait élu domicile dans une boutique désaffectée en bas de chez elle, a soudain disparu, les traits de l’autre Marion, la « chère brigande », se superposent à ceux de la SDF parisienne. L’écrivain décide alors de partir sur les traces de l’insoumise bretonne, qui mourut sur le gibet à trente-huit ans, lui adressant, pour conjurer l’injustice du monde et sa propre impuissance, une longue lettre.

À la faveur du trajet en train vers Quimper, les souvenirs d’une autre époque de sa vie resurgissent, quand, jeune militante, elle manifestait contre la guerre d’Algérie ou, institutrice, elle apprenait à lire aux enfants. La vie de Marion agit comme un miroir tendu à ses utopies et à ses révoltes passées : à dix-huit ans, Marion, elle, créait une bande de brigands. Avec des comparses recrutés parmi ses proches, elle allait écumer les bois et redresser les torts. Le Faouët, les monts d’Arrée, Quimper : tous ces lieux, où Marion a vécu et que l’enquêteuse arpente, ravivent la vaillance et l’impétueuse générosité de son héroïne.

Michèle Lesbre, dans ce texte lumineux, laisse sonner le rire frondeur d’une gamine formée à l’école de la vie, d’une grande amoureuse et d’une femme qui a lutté à sa façon contre une misère choquante. Une belle manière de nous parler d’elle, de nous, du monde dans lequel nous vivons. »