Sœurs d’Ys : la malédiction du royaume englouti

Publié le 16 septembre dernier chez Rue de Sèvres, Sœurs d’Ys est une bande-dessinée écrite par Matthew Tobin Anderson et illustrée par Jo Rioux. Celle-ci nous raconte une version de la légende de la ville d’Ys, citée légendaire qui serait engloutie au large du Finistère. La bretonne que je suis a immédiatement craqué pour cette belle proposition et voici ce que j’en ai pensé…

[NB : Merci aux éditions Rue de Sèvres pour ce bel envoi surprise !]

« Votre mère venait d’un autre monde. Peut-être des îles fantômes des mers du nord. Peut-être de l’envers de la Terre où tout n’est que glace et feu. »

Une légende envoûtante

L’histoire d’Ys et de ses héritières est une légende envoûtante dont j’avais déjà entendu parler qui trouve ici un bel écrin pour être découverte. Ce mythe est une histoire qui nous parle de magie, de sacrifices, d’amour et de choix, bercé dans la mythologie bretonne. Ys est une cité créée au beau milieu des flots, un prodige que seule une femme aux pouvoir immenses aurait pu créer, un lieu d’opulence et de pouvoir qui cache bien entendu sa part d’ombres. L’histoire des héritières d’Ys oscille ainsi entre émerveillement, mystère et horreur. Car derrière la beauté et le luxe se cache des actes sordides. Jamais manichéenne, cette histoire montre aussi la souffrance des personnes dangereuses et l’isolement de ceux qui se sacrifient pour les autres derrière leur masque de cruauté. Passionnante, cette légende est aussi pleine de réflexions sur le prix de l’opulence, le choix de nos destins et la soif de pouvoir. L’opposition des deux sœurs, l’une tournée vers une vie simple, l’autre enfermée dans son rôle d’apparat est formidablement bien retranscrite dans cette histoire tantôt fascinante, tantôt sombre qui est ici formidablement rythmée. Dense, l’histoire n’est jamais alourdie par un trop plein d’explications. Tout y est très juste, parfaitement compréhensible et la lecture est fluide.

Des illustrations superbes

Les dessins de Jo Rioux ne sont pas sans m’évoquer ceux d’Amélie Fléchais (Bergères guerrières) et me plaisent donc énormément. Je suis en effet très friande de ce style à la fois rond et doux qui utilise admirablement la colorisation pour créer toute une ambiance. J’ai été entièrement conquise par les planches de cette BD qui sont non seulement plaisantes pour les yeux mais qui apportent aussi énormément à la narration. Avare de mots, cette histoire se raconte beaucoup en dessin, notamment pour ce qui est des différences entre Rozenn et Dahut, opposées sur deux pages sans qu’aucun mot ne soit utile. Et puis comment ne pas être fasciné(e) par la jeune sœur dans ses voiles vaporeux qui ensorcèle en un regard ? Comment ne pas être attendri(e) par l’aînée et son amour de la nature et des gens simples ? Graphiquement, cette BD est une grande réussite et nous offre du rêve !

En bref, joli petit coup de cœur pour Sœurs d’Ys qui est une BD aussi envoûtante que superbe. La légende bretonne d’Atlantide trouve ici un bien bel écrin pour être découverte, entre les dessins doux et élégants de Jo Rioux et les mots, justes et mesurés de Matthew Tobin Anderson.

« Ys, est une ville d’une beauté merveilleuse avec son palais et ses jardins aux milieux des mers.

Leur souveraine, Malgven, « Reine du Nord » a utilisé sa magie pour maîtriser les monstres marins et ériger de grands murs qui protègent la cité des eaux tumultueuses. Après son inexplicable mort, ses filles s’éloignent l’une de l’autre. Rozenn, l’héritière du trône, passe son temps sur les landes à communier avec les animaux sauvages, tandis que Dahut, la plus jeune, jouit des splendeurs de la vie royale et tue sans regret ses amants au petit matin. Plus leurs destinées s’opposent et plus Ys se fragilise. Les écluses ne protègent plus la cité confrontée aux assauts de la mer, quel secret cachait la Reine ? Telle l’Atlantide, Ys est-elle condamnée à sombrer dans les abysses ? »

(Illustration de couverture et extrait : ©Jo Rioux)

- Lecture pour le Challenge #HMSFFF - Octobre 2020 : Sorcières ! -